Contribution de la FSU Lorraine à la réflexion sur le CPRDFP



La Lorraine a été une des régions les plus fortement marquées par la crise. Près de 40000 emplois industriels ont été détruits et son taux de chômage reste supérieur à la moyenne nationale. Avec 26000 personnes à la recherche d’un emploi, le chômage des jeunes reste à un niveau particulièrement préoccupant.

Dans ce contexte les niveaux de qualification et de formation sont encore un peu plus déterminants dans la recherche d’un emploi.

C’est pourtant dans ce domaine que notre région connaît des difficultés

structurelles mises en évidence dans le dernier rapport annuel du CESE :

Il constate que « les qualifications de la ressource humaine régionale sont en moyenne plus bas…Le nombre de Lorrains poursuivant des études supérieures est toujours trop faible, il manque 5000 étudiants pour atteindre la moyenne nationale.

Les zones d’emploi les plus en difficulté sont celles qui connaissent les indices de qualification les plus faibles.

Une transformation qualitative de l’économie lorraine reste une condition importante du développement futur de la région.

IL NE SE FERA PAS SANS UNE RESSOURCE HUMAINE FORTEMENT

QUALIFIEE.

Le désengagement de l’Etat.

Le CPRDF ne peut pas s’abstraire du cadre général de désengagement de l’Etat dans le domaine de la formation.

Il rappelle à juste titre que la formation initiale est la base non seulement d’un accès à une bonne insertion professionnelle et sociale, mais aussi la base nécessaire pour profiter d’une formation permanente qui permette progression et/ou insertion. On ne peut donc se satisfaire d’une formation initiale dont les effectifs enseignants et éducatifs et même le maillage des établissements et des formations s’appauvrissent.

Les conséquences en sont d’une part un nombre insuffisant de jeunes accédant à des qualifications élevées, d’autre part un nombre trop important de jeunes qui sortent de l’école avec peu ou pas de qualification. Cela transfert aux dispositifs

régionaux de lourdes charges de formation complémentaires, d’insertion et de

requalification des publics fragiles et une difficulté à assurer la FTLV.

Le CPRDF doit donc intégrer, à côté de ces programmes déclarés prioritaires et en effet nécessaires, un réinvestissement de l’Etat dans sa mission de formation initiale.

C’est la base pour la réussite des autres programmes de formation et pour leur recentrage sur de véritables progrès des qualifications.

Dans la formation continue, il convient aussi de se placer dans le cadre d’une modification de l’offre publique. Le transfert de l’AFPA aux régions d’une part, le changement de statut des GRETA d’autre part, enfin l’obligation de passer par des appels d’offre pour choisir les opérateurs empêchent la construction d’un service public de la formation continue.

Dans le cadre du CPRDF, il faut réfléchir aux critères de choix quant aux opérateurs de formation qui sont susceptibles de préserver l’intérêt public.

Apprentissage et carte des formations

Dans notre région, nous constatons que le taux de sortie du système éducatif des jeunes (environ 4%), reste trop élevé.

Or il s’avère que la formation, notamment initiale et plus particulièrement sous statut scolaire, assure au futur salarié, les capacités lui permettant d’évoluer tout au long de sa carrière.

Les propositions régionales évoquent les moyens d’adapter la formation à l’évolution des métiers de demain. Elles posent la question de la « souplesse » et de la « réactivité » qui seraient nécessaires dans l’évolution de la carte des formations, afin que celle-ci s’adapte

mieux aux besoins des entreprises.

Mais, limiter l’offre de formation aux besoins en emplois les plus locaux n’est pas en phase avec une logique de service public. Il faut une offre diversifiée et suffisamment proche afin de faciliter les passerelles et les réorientations, ce qui suppose un maillage équilibré de la carte des formations, complété par des aides aux familles souvent en difficultés (transport,internats, bourses, etc.) afin de donner aux jeunes les moyens d’une mobilité choisie pour suivre la formation qu’ils souhaitent.

Afin de garantir à tous la possibilité d’accéder à un métier réellement choisi, l’offre de formation doit être variée dans les lycées professionnels, ce qui reste un élément contribuant à l’aménagement du territoire.

Les diverses propositions régionales valorisent l’alternance comme moyen de rapprocher la formation et l’entreprise, mais force est de constater que celle-ci n’est évoquée que par l’apprentissage, alors qu’elle est aussi une dimension importante de la formation en lycée professionnel, surtout depuis la généralisation des baccalauréats professionnels en trois ans

où elle représente 44% du temps global de formation.

Il y a un enjeu réel à conforter la formation initiale sous statut scolaire qui contrairement à l’apprentissage, offre les meilleures conditions de réussite dans les poursuites d’études. D’un point de vue économique il est à noter que les divers rapports nationaux montrent que l’apprentissage à un coût supérieur de 26% à la formation sous statut scolaire. Dans une

période où les budgets sont limités, c’est une donnée à prendre en compte.

La volonté gouvernementale de doubler le nombre d’apprentis, alors que dans notre région il plafonne aux environs de seize mille cinq cents n’est pas réaliste. Nous atteignons les limites car pour avoir des apprentis il faut des maîtres d’apprentissage, or le contexte économique des bassins ne permet pas d’envisager une augmentation des offres. De plus cette offre de formation est sujette aux aléas de la conjoncture.

L’apprentissage n’est pas une alternative crédible aux formations dispensées en LP.

L’apprentissage n’est pas une réponse pour les jeunes en difficulté, qui risquent, du fait de la

réforme de la voie professionnelle, de la fermeture des BEP et de l’insuffisance du nombre de places en CAP dans les LP, de venir grossir les rangs des apprentis avec des chances d’y réussir de plus en plus aléatoires, dans le contexte actuel. Or l’apprentissage est trop

souvent la seule réponse proposée aux élèves décrocheurs ou « sans solutions », un choix par défaut alors que la motivation devrait être moteur pour la réussite. L’apprentissage (en particulier aux niveaux IV et V) ne permet pas de construire des bases suffisamment solides

pour permettre d’obtenir un diplôme, d’évoluer professionnellement et de bénéficier pleinement de la formation continue. Comment par le tout apprentissage augmenter le nombre de diplômés du supérieur ?

Pôle de compétences, mixité des publics et modularité des enseignements.

Les pôles de compétences sont à mettre en parallèle avec les bassins d’emploi et l’employabilité.

Les pôles de compétences visent une spécialisation de la main d’oeuvre, une offre de formation en adéquation avec la demande des entreprises et la réduction des coûts de formations.

Pour mettre en place une telle démarche, il est nécessaire d’avoir une mixité des publics (formation initiale sous statut scolaire, apprentis, formation continue et VAE).

S’il est envisageable d’accueillir des publics mixés dans un même établissement, il est impossible de recevoir un public mixé dans une même classe. La gestion d’élèves ayant des objectifs de formation différents ne peut se faire qu’avec la mise en place d’un enseignement modulaire. La modularisation des enseignements annonce la disparition des diplômes au

profit des unités de compétences (UC) qui vont mettre à mal les grilles de salaires.

La nécessité d’un accès à l’information à l’orientation.

La charte AIO, adoptée l’an dernier, a permis, dans le respect des spécificités de chacun, de mettre en commun le savoir-faire et les compétences de chaque organisme d’accueil et d’information à l’orientation au service des lorrains.

La Fsu rappelle cependant la nécessité primordiale de maintenir au sein de l’Education Nationale les Conseillers d’Orientation Psychologues et de conserver dans les territoires les Centres d’Information et d’Orientation.

Les menaces pesant sur les centres à gestion départementale soulèvent de grandes inquiétudes.

Quelle(s) ambition(s) pour le CPRDF ?

Un CPRDFP réussi est un contrat de plan qui aura permis aux Lorrains de disposer de l’outil de formation, dont ils sont besoin, qui correspond à leurs besoins.

Les liens entre formation, qualification et emploi sont complexes : ignorer la problématique de l’insertion professionnelle n’aurait aucun sens, construire un lien adéquationniste strict n’en aurait pas davantage.

Il s’agit tout d’abord de s’interroger sur les objectifs poursuivis lors de l’élaboration d’un plan de formation.

Qu’est-ce qu’une formation réussie ?

Une formation réussie d’un individu est une formation initiale réussie, puis une

formation tout au long de la vie lui permettant, d’actualiser ses compétences, d’en

acquérir de nouvelles.

Une formation réussie est une formation qualifiante et diplômante dans un cadre national.

Une formation réussie est une formation initiale de haut niveau, qui permet notamment aux salariés de s’adapter à l’emploi et à ses évolutions.

Où doit se trouver la formation ?

Les formations, notamment de niveau V et IV doivent être des formations de proximité car ce critère est très discriminant socialement. Le manque d’ambition scolaire des enfants issus des milieux sociaux défavorisés est un problème majeur.

Pour y répondre – au-delà de la mise en place d’un système d’internat pur héberger les élèves dont le domicile est éloigné – une offre de proximité large est donc nécessaire.

La formation doit –elle répondre aux seuls besoins économiques locaux ?

La « mono – formation » sur un territoire ne doit pas remplacer la « mono-industrie » qui a été la caractéristique de la Lorraine.

Répondre aux besoins immédiats d’une économie locale est une tentation qu’il convient de contourner car elle peut très vite être un piège qui se refermerait sur la population.

Construire un contrat de plan de formation suppose donc de trouver le bon équilibre entre les besoins économiques et la demande sociale de la population, le parcours de vie d’un individu ne pouvant pas être limité à un territoire.

Un contrat de plan réussi est donc un contrat qui réussit à intégrer les contraintes économiques, sociales et territoriales. Cela suppose de faire des choix dans un contexte budgétaire tendu aussi bien pour l’Etat que pour le Conseil régional de Lorraine.

Pour la FSU LORRAINE, il est bien évident qu’implanter toutes les

formations partout n’a aucun sens mais qu’il convient en permanence au bénéfice des populations d’offrir sur les territoires une offre variée de formation. Sans ignorer le carcan budgétaire, il s’agit de développer une vraie logique de service public d’éducation. Au moment où l’Etat se désengage, où les suppressions de postes sont si importantes que la priorité est d’essayer d’empêcher une dégradation du service

public, le CPRDF doit conserver toutes ses exigences et toutes ses ambitions en matière formation pour assurer l’avenir de la Région.