Nous venons de nous rendre compte que la tribune parue dans Libération de ce jour à non seulement été coupée mais qu’elle a été modifiée ("voici le sens du socle commun que nous proposons") phrase jamais écrite par Bernadette.
La rentrée scolaire a mis en évidence le manque d’ambition du gouvernement pour les jeunes : La partie la plus visible de l’iceberg est celle des suppressions massives de postes (80 000 en 6 ans) mais la partie immergée, celle des « réformes » éducatives, est tout autant dévastatrice :
La France a aujourd’hui une Ecole inégalitaire et à plusieurs vitesses. D’un côté on sort les plus « méritants » du lot commun, de l’autre on sort les élèves « perturbateurs » du système éducatif. D’une coté on offre à certains jeunes, au mieux l’accès au socle commun et parfois dès 15 ans l’apprentissage, de l’autre une scolarité plus complète avec la perspective d’un bac+3 mais chaque année 130 000 élèves quittent le système sans qualification… En ce sens l’Education prioritaire doit être reconsidérée.
Quid d’une politique éducative répondant chaque jour, dans toutes les classes, à la prise en charge de chaque élève avec l’objectif de les faire réussir tous ? C’est le véritable enjeu d’avenir. Il faut d’ailleurs saluer le travail des personnels de l’Education qui par leur engagement professionnel quotidien permettent d’éviter une dégradation encore plus importante.
Notre système éducatif ne prend pas la mesure des évolutions à venir, qu’elles soient culturelles, technologiques, scientifiques, économiques ou écologiques. Il est temps de penser l’Education, la Formation et la Recherche comme des « investissements » garantissant un avenir aux générations futures.
L’Education est une responsabilité collective. Le gouvernement laisse croire que réussite et/ou échec scolaire dépendent de la seule volonté individuelle des acteurs (élèves, parents, enseignants, personnels de l’éducation). Ceux qui font des efforts réussissent, ceux qui échouent n’auraient pas la volonté d’y arriver … Quid de la responsabilité de l’Ecole ? De la politique éducative et des moyens alloués ? Quid des inégalités sociales et territoriales ?
Une nouvelle étape de démocratisation du système éducatif est urgente et demande de rompre avec les choix politiques et idéologiques actuels. L’objectif est d’assurer une scolarité complète et réussie à tous les jeunes en portant la scolarité obligatoire à 18 ans. Pour cela, il faut articuler deux impératifs : penser un autre projet éducatif et travailler à une nouvelle dynamique et à un fonctionnement de l’Ecole adaptés à ces ambitions.
Le projet éducatif à venir doit redonner un sens à l’Ecole dans notre société, retisser les liens avec les savoirs et la culture, facteurs d’émancipation et de citoyenneté. C’est le sens de la culture commune, indispensable à chacun, que nous proposons. L’Ecole doit aussi permettre à chaque jeune de trouver sa voie professionnelle. Il faut réhabiliter l’idée que le système éducatif doit et peut faire réussir tous les jeunes et que cela relève d’une responsabilité collective de notre société. L’engagement de l’Etat est fondamental pour assurer le droit à l’éducation pour tous sur tout du territoire.
Un tel projet nécessite de penser le parcours de l’élève de la maternelle à l’enseignement supérieur. Cela se pense avec le nécessaire lien entre l’Ecole et son environnement.
Les efforts doivent prioritairement porter sur ce qui se joue dans les classes, sur les apprentissages à construire et à développer. C’est d’abord là que doit être proposée et organisée « l’aide aux élèves ». Mais pour que les personnels exercent mieux leurs métiers, il faut leur en donner les outils. La formation est un enjeu majeur. Il ne suffit pas de posséder un haut niveau de qualification, le master, pour savoir enseigner. Enseigner est un métier qui s’apprend. Il est indispensable de donner aux futurs enseignants une formation professionnelle et donc de faire une autre réforme de la formation des enseignants et réactiver la formation continue. De même, les défis à relever, l’évolution des publics scolaires imposent de travailler différemment et notamment de sortir de l’exercice solitaire du métier en donnant du temps de concertation pour développer le travail en équipe, en permettant de travailler en petits groupes, de dédoubler des classes, de mieux prendre en charge tous les élèves…
Le débat sur les services des enseignants, leurs missions, leurs statuts, n’a de sens que dans cette perspective, et avec le double objectif d’améliorer la réussite des élèves et les conditions d’enseignement des enseignants.
Nous n’opposons pas, comme le Président de la République, la qualité à la quantité. Pour relever les défis et permettre un autre fonctionnement de l’Ecole, il faut des personnels formés et en nombre suffisant. Nous proposons un système de pré-recrutements pour les étudiants et la mise en œuvre d’un plan pluriannuel de recrutements afin de rattraper la politique dévastatrice de ces dernières années et recruter progressivement à la hauteur des besoins.
La société a rendez-vous avec l’Ecole. Le XXIème siècle doit être celui de l’engagement pour la réussite de tous les jeunes. Cela demande de l’imagination et de l’ambition. Il sera nécessaire aussi de redonner confiance dans le système éducatif et à ses acteurs. Les évolutions ne se feront pas sans eux…